Chasse à l'enfant
Bandit! Voyou! Voleur! Chenapan!
Au-dessus de l'île on voit des oiseaux
Tout autour de l'île il y a de l'eau
Bandit! Voyou! Voleur! Chenapan!
Qu'est-ce-que c'est que ces hurlements
Bandit! Voyou! Voleur! Chenapan!
C'est la meute des honnêtes gens
Qui fait la chasse à l'enfant
Il avait dit J'en ai assez de la maison de redressement
Et les gardiens à coups de clé lui avaient brisé les dents
Et puis ils l'avaient laissé étendu sur le ciment
Bandit! Voyou! Voleur! Chenapan!
Maintenant il s'est sauvé
Et comme une bête traquée
Il galope dans la nuit
Les gendarmes les touristes les rentiers les artistes
Bandit! Voyou! Voleur! Chenapan!
C'est la meute des honnêtes gens
Qui fait la chasse à l'enfant
Pour chasser l'enfant pas besoin de permis
Tous les braves gens s'y sont mis
Qu'est-ce qui nage dans la nuit
Quels sont ces éclairs ces bruits
C'est un enfant qui s'enfuit
On tire sur lui à coups de fusil
Bandit! Voyou! Voleur! Chenapan!
Tous ces messieurs sur le rivage
Sont bredouilles et verts de rage
Bandit! Voyou! Voleur! Chenapan!
Rejoindras-tu le continent rejoindras-tu le continent
Au-dessus de l'île on voit des oiseaux
Tout autour de l'île il y a de l'eau.
Jacques Prévert
Pour la poésie du jeudi j'ai choisi ce poème de Jacques Prévert pour faire suite à l'article publié hier sur les pénitenciers d'enfants.
En 1934, au pénitencier de Belle-Ile-en-Mer, un enfant ose mordre dans un bout de fromage avant de manger sa soupe en silence. Les gardiens le rouent de coups. Les autres enfants se révoltent et une émeute éclate, 55 d'entre eux en profitent pour s'évader. L'administration organise alors une battue pour les retrouver. On promet une prime de 20 francs aux habitants de l'île et aux touristes pour chaque enfant qu'ils ramèneront.
Jacques Prévert profondément choqué écrit alors ce poème.
commenter cet article …