Pour ce Défi N° 65, Tricôtine nous propose d'utiliser les mots: fil, pelote, tissu, perles, coton, boutons, dés, patrons, aiguille pour confectionner un texte dans la forme qui nous convient n'ayant RIEN à voir avec la couture ou le tricot.
J'allais oublier, nous devons trancher/couper avec l'instrument de notre choix.
Et bien Tricôtine, en voilà un thème qui va nous permettre de lire des textes variés ! Pour ma part, ce sera sous forme de lettre ouverte, cri du coeur d'une qui a du mal à accepter l'inacceptable.
Lettre ouverte aux compagnons de mon adolescence, perdus de vue, chers à mon coeur
Chers vous tous,
Dans les années 70, nous étions jeunes et insouciants, nous avions des rêves et des projets. Nous ne suivrions pas le fil monotone de la vie comme l’avaient fait les générations précédentes. Nous vivrions dans la joie, la complicité et la solidarité cette belle aventure qu’est la vie.
Notre monde à nous ne serait pas cette pelote embrouillée de soucis et tracas divers dans laquelle chacun cherche à trouver "son bout" avec un individualisme forcené. Nous allions tordre le cou à la société de consommation et construirions un monde meilleur.
Hélas… il suffit de regarder la télévision, lire les journaux ou surfer sur la toile pour s’apercevoir que le tissu social s’est dégradé et que les relations humaines sont à frémir. La pauvreté, le chômage, la violence, l’ignorance de ses semblables, le manque de respect… tout cela a pris des proportions effarantes depuis nos jeunes années. La solidarité, parlons-en ! Sans abris croisés dans l’indifférence pressée, camps de Roms démantelés au petit matin avec notre complicité silencieuse, voisins dont on ignore tout, et même certains petits vieux morts de canicule non réclamés plusieurs mois après leur décès… Si ce n’est pas de la solitude ça ! Est-ce là, le monde que nous nous étions promis de construire ? Banques toutes puissantes, monde dominé par l'argent, restriction des libertés individuelles, destruction systématique des acquis sociaux gagnés de haute lutte par nos arrières-grands-parents, catégories de citoyens montées les unes contre les autres parce qu'ainsi il est plus facile de régner... voilà quelques exemples de ce que nous avons fini par accepter. Il en est beaucoup d'autres.
Voici maintenant qu’une larme perle à mes paupières, mes jambes sont en coton, je revois certaines images de ces humains, mes semblables aux yeux grands ouverts sur une interrogation muette, « pourquoi ? »
J'entends des discours qui me donnent des boutons ! On veut nous faire croire que les dés sont jetés, qu'on ne peut plus rien changer. Un grand patron mérite-t-il le salaire exorbitant qui est le sien quand des millions de français vivent en dessous du seuil de pauvreté. De fil en aiguille, certains se laissent convaincre, trouvant en plus pauvre, plus étranger, le coupable rêvé de toutes leurs difficultés. Et de là à la haine, le pas est vite franchi...
Je suis certaine que beaucoup d’entre vous ressentent avec douleur cet écart entre ce que nous souhaitions et la réalité que nous vivons.
Un jour, il faudra bien trancher : pouvons-nous continuer à fermer les yeux et nous taire ? Ce monde dont nous rêvions, en partageant à l’aide d’un vieil opinel le saucisson acheté en nous cotisant, souhaitons - nous y renoncer ? Non ?
Alors, je vous donne rendez-vous dans les urnes, dans la rue s’il le faut, partout où l’action des citoyens peut aider à lui donner jour.
Comme les Espagnols, indignons-nous ! J’ai confiance en vous.
A bientôt,
Votre amie,
Mireille