Noël au balcon ! Faudrait être fou ! Les flocons voltigent enfin dans le Var... Vraiment, pas de balcon cette année. C'est Noël aux tisons ! Je ne me souviens pas d'un hiver aussi froid mais je sais bien que ma mémoire est sélective et que, pour mon bonheur, elle enregistre de préfèrence, les choses les plus gaies et les plus agréables.
Ces dernières semaines, nous avions connu pluie, et pluie, et pluie. Mais aussi gelées blanches, il a fallu gratter les parebrises y compris sur le littoral. Lorsque la pluie cessait, le mistral, vent fou ou plutôt, comme on dit en Provence, "vent des fous", soufflait. Cette année donc, nous avons froid. Très froid.
Enfin, pour Cap'taine Tricôtine, je vais tenter quelques lignes, entre un Noël tendre autour d'une partie de ma famille et un séjour chez mes parents. Je vais vous conter Noël au balcon tout en y glissant suivant la consigne, des morceaux de proverbes.
Nous étions réunis sur la terrasse. Le temps était doux. Les amandiers déjà fleurissaient. Noël au balcon. Nous ne pensions ni à Pâques, ni aux tisons. Nous étions heureux. Les rayons hivernaux nous apportaient leur tiédeur bienfaisante et nous évitaient la brûlure à laquelle nous avions fini par nous habituer pendant la période estivale. Pas de chapeau ni de lunettes noires. Juste un petit lainage. Car, à Noël, ne te découvre pas d'un fil, c'est bien connu ! La lumière tendre éclairait le jardin. Les photos prises pour fixer la journée, ce Noël, ressembleraient à des aquarelles.
Mes grands-parents étaient venus nous rejoindre. La parole est d'argent, disait ma grand-mère, la tendresse est d'or. Ses yeux affectueux en déversaient sur nous une épaisse couverture. Elle racontait des histoires aux plus jeunes assises autour d'elle et les couvait avec tendresse. Mon père avait ouvert des huîtres dont les adultes se régaleraient sous mon regard écoeuré. Interdit de faire la grimace. Comme chacun le sait, si tu n'aimes pas ça... Mon grand-père commentait les nouvelles entendues aux actualités. Il avait une formule pour les résumer: quand le gouvernement s'entête, les enfants trinquent ! Et les enfants, c'était nous..
Pourtant, nous nous sentions heureux. Heureux et unis. L'amour comme un lien. La veille, il y avait eu les cadeaux, un repas savoureux, des rires et des jeux. Nous profitions du beau temps pour lézarder. Chacun vaquait. Moi, je lisais. Dans quelques jours, nous fêterions ensemble l'année nouvelle. Alors, avant de trinquer, maman dirait:
"A l'an que vèn et si san pas maï qu'au mens siguen pas mens."
Et elle sourirait émue avant de traduire en français:
A l'an qui vient et si nous ne sommes pas plus que nous ne soyions pas moins.
Nous, les filles, on éclaterait de rire, moqueuses, et on s'écrirait: "Tu nous l'as déjà dit ! On sait ce que ça veut dire !" Si jeunesse savait...
Maintenant que j'ai vieilli, je comprends qu'elle ressuscitait ainsi son enfance et conjurait le mauvais sort. Hélàs, il ne nous a pas épargnés. J'éprouve alors pour elle une immense bouffée de tendresse.
A l'an que vèn !
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