Les doigts posés sur les cordes, droit dans ses bottes,
De sa voix chaude, voilà que mon pote
Chante et c'est beau.
Regards complices aussitôt.
Le public applaudit et moi, je suis ravie.
Cette joie qui lui est donnée
Comme il l’a méritée !
Un infime sourire éclaire son visage,
Dans ma tête défilent un tas d’images.
Retour en arrière sur les mois de galère,
Sur ses déceptions et ses colères.
Souvent il faisait faim, parfois il faisait froid
Mais le café partagé et l’amitié nous réchauffaient.
Joue, mon pote, joue,
Ta musique coule en nous.
Avoir pu t’écouter cent fois t’emballer,
Avoir été témoin de merveilleux projets,
Et être à tes côtés sans un instant douter que ce jour arriverait.
Quand le bois manquait, que le feu s’éteignait,
Savoir tes doigts gourds, jouer à t’enrager,
Tel un boxeur sonné quelques fois tituber
Puis remonter sur le ring pour ne pas abdiquer,
Tu mariais sans faiblir rage et volonté.
Tes doigts sur le manche couraient
Et pour un coup reçu, tes rêves exaltés jamais abandonnés
Plus loin, plus haut, te portaient.
Joue, mon pote, joue,
Ta musique coule en nous.
Tu parlais d’amitié et d’un autre possible,
Ensemble complices on en riait.
Debout après l’orage, tu es encore plus fort
Comme sont forts ceux qui parlent vrai,
Joue et chante pour nous, pour eux,
Pour la vie,
Pour la femme qui aujourd’hui te sourit.
Quant à moi, je te dis grand merci
Pour l’oreille attentive au cœur de mes jours gris
Et pour m’avoir appris
Que passé cinquante ans, on peut se faire des amis.
Tes doigts ont quitté la guitare,
J’entends d’ici ta voix qui marmonne
« Peut pas s’taire cette conne ? »
J’ai passé la barrière convenue de pudeur
Qui fait que tant de gens verrouillent leur cœur,
Marmonne tant que tu veux, tu n’me fais même pas peur !
Mais joue, mon pote, joue,
Ta musique coule en nous.
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